Journée de la Femme
Parole d'une figure féminine majeure à l'occasion de la journée de la femme.
Marguerite Yourcenar : cette écrivaine qui coupa quelques instants la respiration d'une France stupéfiée ! Oui, c'est elle, la première femme élue à l'Académie française, la première à pénètrer dans ce sanctuaire masculin.
En deux mots, qui est-elle ?
Née en Belgique en 1903, elle grandit dans le Nord de la France, en pleine campagne. Petite fille curieuse, des yeux transparents, elle est orpheline de mère, et commence très jeune à écrire. Elle publie tôt un recueil de poèmes, et dira plus tard que sa « première patrie ont été les livres ». Elle voyage beaucoup, et après diverses relations amoureuse, elle part rejoindre Grace Frick, son éditrice et compagne, aux Etats-Unis. Elle est élue à l’Académie en 1980, et décède en 1987.
Malgré ce panel de vie, l’égérie du féminisme et symbole historique reste cependant en marge du féminisme contemporain. Elle invite à la prudence à propos du chemin que prennent les femmes, qui pour s’affirmer, s’opposent à l’homme : Marguerite partage la bonté de leur finalité, s’émanciper et promouvoir plus d’égalité, mais elle ne s’accorde pas avec les moyens pris pour l’atteindre. Les femmes, en se définissant par l’opposition, se mettent en marge, forgent d’elles-même leurs propres ghettos qu’elles auraient refusé jadis si on les leur avait proposé : restaurant ou boîte de nuit pour femmes, qu’en auraient-elles pensé il y a cinquante ans ? Elles se seraient bien indignées ! La femme se met en marge, alors qu’elle doit précisément dans son combat s’affirmer comme être humain au même titre que l’homme !
« La femme est un être humain, au même titre que l’homme » dit Marguerite. Banalité ? Mais pourtant, pas tant que ça ! La femme veut se distinguer à tout prix, mais au fond, elle lui ressemble énormément. À part tout ce qui touche à l’ordre sexuel, elle se comporte à peu près comme un homme : elle marche, elle touche, elle digre, elle respire ! Incroyable ?
Donc…
Aujourd’hui, ce qui cloche : se considérer comme un groupe à part ou bien encore en opposition à l’homme, alors qu’homme et femme partagent la case « être humain ». Certes les lois désavantageaient et désavantagent les femmes, de nombreuses choses méritent d’être revues, comme les salaires, ou encore des mesures grotesques comme le fait de pouvoir mettre sa femme en prison pour infidélité !
Mais Marguerite invite à la nuance : oui au XVIIe siècle les femmes n’étaient pas académiciennes, mais laissons libre cours à notre imagination, dans la petite bourgeoisie, qui était au comptoir, qui gérait les fonds ? Les femmes régnaient, elles étaient de vrais maîtres de maison, on en a tous l’image en tête. Pas dans les lois, mais dans la vie. Donc Marguerite met en garde sur la distinction importante à faire entre cadre légal et mœurs !
Allez on pousse un peu plus loin !
À l’occasion de la journée de la femme, la parole de Marguerite invite à se requestionner sur ce que doit vouloir la femme et comment l’atteindre : oui pour une plus grande égalité, mais non pour se construire en marge, en opposition. Ceci les desservirait. Ne pas se construire en opposition ne veut pas dire « on abdique de toutes nos différences » ! Non, au contraire, soyons fières d’être des femmes. Mais comme le dit Marguerite, qu’est-ce qui rend vraiment spécifique la femme par rapport à l’homme ? Sa sexualité !
Alors, ça veut dire quoi ? Si sa sexualité la rend spécifique, c’est qu’il y a dans cette sexualité quelque chose de spécifique. Quoi donc : sans chercher midi à quatorze heure, ce ne serait pas sa maternité ? Le dire aujourd’hui fait presque mal à la bouche, car ceci s’entend comme une faiblesse par rapport à l’homme. Mais si on partage une même étiquette « humain », qu’on quitte ce rapport d’opposition, qu’on cultive la spécificité, alors pourquoi ne pas en être fière : la maternité n’est pas une tare ni une différence discriminante, elle est une spécificité voire un plus !